Conseils administratifs
17 juillet 2024
Comment rédiger un contrat de cession de droits
Comment rédiger et négocier un contrat de cession de droits ?
Un contrat de cession de droits, ça sert à quoi ?
Si un contrat n’est pas légalement obligatoire (la facture pouvant parfois suffire), il est cependant quasiment systématique et crucial pour cadrer votre travail de manière précise. Un contrat sert à envisager toutes les possibilités, que le travail se passe bien ou mal, pour protéger toutes les parties, la maison d’édition comme l’artiste.
Quelle que soit l’exploitation qui sera faite de vos illustrations, celle-ci doit être strictement cadrée par un contrat de cession de droits d ’auteurs. Ce contrat sert principalement à définir :
les conditions dans lesquelles l’Artiste cède à la Société ses droits patrimoniaux pour lui permettre d’exploiter les illustrations
les conditions de rémunération pour la création des illustrations et pour leur exploitation
les conditions de travail dans lesquelles les illustrations seront réalisées- les différentes garanties apportées par les parties.
Négocier un contrat est une protection sur laquelle tout le monde doit trouver son compte. Prenez le temps de bien lire celui-ci et faites-vous aider si besoin. Ne signez jamais des termes que vous n’êtes pas sûrs de comprendre.
Le contrat est très généralement fourni par la maison d’édition, mais la CIL travaille actuellement à la création d’un modèle de contrat type (lire notre article sur ce sujet). Si vous êtes membre, vous pouvez télécharger ce draft dans les ressources paperasse administrative et nous aider à l’améliorer en vue de le faire valider par un ou une professionnelle juridique.
Les conditions et cession des droits patrimoniaux
Étendue des droits cédés : droits de reproduction (pour l’édition du jeu), de représentation (pour la promotion du jeu), de traduction et/ou d'adaptation (pour les versions étrangères / versions de poche ou de luxe du même jeu).
La durée : en général fixée à la durée légale en France de 70 ans post mortem. Nous vous conseillons cependant dans ce cas de préciser “pour la durée d’exploitation du Jeu et de ses adaptations incorporant les OEuvres Graphiques par la Société et ses licenciés, dans la limite de la durée légale des droits d’auteur.” Cela vous permettra ainsi de récupérer les droits sur vos illustrations en cas de cessation d’exploitation. Vous pouvez également fixer une durée d’un certain nombre d’années.
La zone géographique : en général “sur le territoire français et francophone en langue française” ou “pour le monde entier et en toutes langues.”
La destination : sur quel support sera reproduit le jeu. Si certains contrats détaillent précisément l’ensemble des supports possibles à l’édition d’un jeu de société, il est également courant de trouver une formulation comme “sur tout support physique, et ce par tout procédé technique existant ou n’existant pas encore à la date de rédaction du Contrat.”
Les adaptations
Certaines adaptations peuvent être comprises dans le contrat de base (comme les goodies, moyennant une rémunération proportionnelle spécifique), mais nous vous conseillons de réaliser des avenants au contrat pour toute autre exploitation que celle du jeu de société en tant que tel (par exemple pour des hypothétiques adaptations numériques et audio-visuelles)
Conditions de rémunération
Plusieurs types de rémunérations existent et se pratiquent dans le milieu de l’édition de jeux :
La rémunération fixe : c’est le montant de votre devis, la somme que vous allez encaisser une fois les illustrations réalisées. Elle peut faire l’objet d’une avance à la signature du contrat (généralement entre 20 et 50%), avec le solde perçu après que l’ensemble des illustrations soient livrées. Cette rémunération peut être un forfait fixe, avec ou sans droits d’auteurs perçus en supplément, ou une avance sur droits d’auteur. Dans tous les cas, cette somme doit rester acquise quel que soit le succès du jeu.
la rémunération proportionnelle, ou droits d’auteur : c’est votre participation au succès du jeu. La loi française prévoit que toute exploitation commerciale d’une œuvre artistique donne lieu à un versement de droits d’auteurs. Ils peuvent correspondre à 3% (généralement) à 5% (plus rare) du chiffre d’affaires hors taxe (CA HT) de l’éditeur, ou encore de 1,2% du Prix Public Hors Taxes (PP HT) de l’éditeur.
Si la loi semble rendre obligatoire ce type de rémunération, elle n’est pourtant pas systématique. La CIL a notamment pour objectif de demander une aide juridique pour clarifier l’article L131-4 du code de la propriété intellectuelle dans le cas de l’illustration de jeux de société.
Si votre partenaire refuse de verser des droits d’auteurs, d’autres solutions existent, comme un bonus tous les x jeux vendus, ou à chaque réimpression du jeu.
Si aucune solution de ce type n’est envisageable, nous conseillons d’adapter le devis du rémunération fixe pour pallier ce manque.
Dans le cas d’avance sur droits d’auteur, les premiers droits sont versés à l’artiste une fois que les ventes ont remboursé l’éditeur de l’équivalent du montant de l’avance, c'est-à-dire de la rémunération fixe totale (avance + solde) correspondant au devis initial. Notons qu’il est finalement courant que cette avance ne soit jamais remboursée et que l’artiste ne perçoive rien de plus que l’avance sur droits d’auteur. L’avance est souvent remboursée uniquement si le jeu est un grand succès. Le choix de rémunérer l'artiste en droits d’auteur avec avance sur droits ne représente donc pas plus de risque financier pour la maison d’édition que la solution du forfait fixe.
Conditions de travail
Le contrat peut également être l’occasion de prévoir toutes les conditions de réalisation des illustrations comme :
- une date de rendu des illustrations
- le tarif appliqué par l’artiste en cas de retouches au delà d’un certain nombres de retours compris dans la rémunération de base
- l’engagement de réactivité de l’éditeur pour déresponsabiliser l’artiste en cas de retard sur le planning si l’éditeur ne répond pas en temps et en heure aux différentes étapes de validation
Garanties apportées par les parties
Parmi les garanties apportées par l’artiste et par la maison d’édition on peut notamment retrouver ou demander à ajouter les clauses suivantes ;
L’interdiction d’utilisation d’IA génératives d’image dans le processus créatif. Nous rappelons que la CIL n’encourage pas son utilisation. Elle vous prémunit ainsi d’un éventuel complément des éléments du jeu générés par l’éditeur via des intelligences artificielles. Cette clause protège à la fois l’éditeur et l’artiste.
l’engagement de la maison d’édition à faire apparaître le nom de l’artiste sur la boîte (de préférence couverture) du jeu et sur les règles.
l’envoi d’exemplaires du jeu à l’illustrateur une fois le jeu imprimé, avant ou pendant sa sortie (généralement entre 1 et 10 boîtes).
Rappelez-vous que vous n'êtes jamais dans l'obligation de signer un contrat s'il ne vous convient pas. L'établissement du contrat est l'occasion pour l'éditeur.ice et l'illustrateur.ice de négocier ensemble, de trouver des compromis, d'expliquer ses raisons de tenir à telle ou telle clause. Toutes les conditions sont négociables entre les parties et doivent vous convenir au maximum, n'hésitez donc pas à apporter tous les commentaires que vous souhaitez sur le document, pour ensuite essayer de vous retrouver un maximum à mi-chemin entre les 2 parties.
Quelques liens utiles pour aller plus loin :
code de la propriété intellectuelle
Contrat de cession de droits d'auteur sur le site du service public
Principes du droit d’auteur des arts visuels sur le site de l’ADAGP